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Notes de lecture
La végétarienne, de Han Kang, Le Serpent à Plumes.
Publié dans son pays en 2007 et traduit en français en 2015 par Jeong Eun-Jin et Jacques
Batilliot, jen propose un
extrait en ce moment sur le site collectif LaiR Nu.
Ce roman met en scène une jeune femme Yonghye, qui, à la suite dun rêve décide
de devenir végétarienne du jour au lendemain. Décision irrationnelle, survenue à la
suite dun rêve étrange.
Aussi, les lecteurs qui croient deviner derrière ce roman une apologie du véganisme en
seront pour leurs frais. Pas de réflexion sur la surproduction de viande ou toute pensée
écologique cohérente sur laquelle se fonde le végétarisme. De plus, le récit met en
scène plusieurs personnages peu recommandables, le mari macho qui a vite fait de
séclipser, le beau-frère qui profite de la faiblesse psychologique de sa
belle-sur pour assouvir ses égarements sexuels. Seule sa sur (la femme du
pervers) tente de nouer le contact avec Yonghye qui senfonce de plus en plus dans sa
folie.
Je ne pense pas que ce roman soit le plus adéquat pour rentrer dans lunivers de Han
Kang, qui a été récompensée en 2024 par le prix Nobel de littérature « pour la
profondeur de sa prose poétique qui s'oppose aux traumatismes de l'histoire et
révèle la fragilité de la vie humaine ». Depuis, jen ai lu dautres
qui proposent une humanité plus visible. Mais peut-être nest-ce quune
question de point de vue culturel.
(21/01/2025)
Le cheval dorgueil, de Pierre-Jakez Hélias,
Pocket.
Emblématique de la Bretagne, ce récit, intitulé également Mémoires dun
breton du pays bigoudin, a été publié en 1975. A cette époque, il rencontre un
grand succès. Au milieu des années soixante-dix, en effet, le régionalisme est devenu
plus revendicatif, cest lépoque du Front de libération de la Bretagne, de
lintroduction des langues régionales. Des groupes et des artistes comme Alan Stivell et Tri-Yann
dépoussièrent le folklore local (à la même époque dailleurs, dans ma campagne
profonde, jacquiers une guitare « folk », je vais dans des fêtes de
villages où sagitent mollement des chevelus munis de sabots et de chemises de
grands-pères).
Le cheval dorgueil aujourdhui est débarrassé de toute cette mode de
retour à la terre qui prévalait alors. Lire ces Mémoires dun breton du pays
bigoudin, tandis que Rennes est devenue une succursale de bobos parisiens, est aussi
étrange quobserver les murs des martiens de la Guerre des mondes
dH. G. Wells. Ce monde, oui, a irrémédiablement disparu. Cependant, une nostalgie
demeure à la lecture de cette vie lente dalors, rythmée par des certitudes
dun autre âge, des évènements et des guerres qui ont achevé demporter dans
loubli ces existences paysannes. Lire Le cheval dorgueil, cest
comme lorsque je me promène dans le village de Bouxières (une de mes balades favorites
en ce moment). Je ne manque jamais de plonger ma main dans le lavoir pour sentir la fuite
du temps sous la fraicheur de leau.
(13/01/2025)
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