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Atelier d'écriture Les Islettes

(Avril 2025)

 

Je retrouve avec une grande joie le village des Islettes et sa médiathèque, administrée par la dynamique Francine. J’étais intervenu en 2023, j’en garde des traces ici, et c’est important pour varier les plaisirs et ne pas refaire les mêmes animations.
Dans ce village isolé de tout, si je retrouve les participants du Foyer d’accueil de Clermont-en-Argonne, Francine a également réussi à faire venir des pensionnaires du Centre parental de cette même cité, ainsi que des demandeurs d’asile du CADA de Bar-le-Duc. Public diversifié donc, francophone et allophone.

 

Première séance, le 2 avril 2025 :

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Je retrouve les petites routes qui serpentent à travers la campagne et les bois pour rejoindre Les Islettes. Malheureusement, un village est en réfection et m’oblige à un détour d’une dizaine de kilomètres, j’arrive donc avec un petit retard, mais j’ai circulé sous un soleil magnifique et une température plus que printanière.
Les participants sont nombreux, une fois de plus, douze inscrits, sans compter six accompagnateurs, et deux bébés de quelques mois, venus avec le Centre parental ! Nous sommes ainsi vingt et un réunis dans la bibliothèque.
Je me présente brièvement, j’ai apporté quelques livres et le DVD de L’Homme debout.
Mais, très rapidement, je donne à chacun la parole par un tour de table. Les pensionnaires du CADA commencent, suivis par ceux du Foyer d’accueil et ceux du Centre parental. Dans ce premier contact, chacun imagine en silence les circonstances qui ont amené dans ces structures les participants. C’est important pour faire corps ensemble et créer une bonne dynamique de groupe. C’est également essentiel si je veux embarquer tout le monde dans mes pérégrinations d’écriture, et, avec trois nationalités étrangères, deux participants qui débutent notre langue depuis quatre mois, des handicaps légers ou des situations problématiques, je n’ai pas le droit de laisser quelqu’un de côté.
Justement, histoire de partir du bon pied, je demande à chacun d’écrire l’acrostiche de son prénom en évaluant les qualités qu’il semble posséder ou les défauts qu’il n’a pas. C’est l’occasion pour chacun de lire à voix haute son premier texte et de révéler qu’on se voit aimable, élégant, intelligent, unique, parfois têtu ou nerveux. Nous voici ainsi tous unis par nos qualités humaines !
Maintenant, je cherche à les faire écrire sur un sujet qui nous réunis tous : la cuisine.
L’écriture culinaire est en effet bien normée : la liste des ingrédients, les noms des ustensiles, le vocabulaire si spécifique qui compose une recette. A partir de ces éléments, je leur demande de rédiger leur propre recette du bonheur, en s’aidant des qualités qu’ils ont énumérées dans leurs propres acrostiches. Pour certains, je place la barre un peu haut. Il faut en effet faire preuve d’abstraction, d’un sens du second degré pas maitrisé quand on commence une langue. Je propose alors d’écrire pour ceux qui le désirent une recette, par exemple celle de leur pays.
Les congolais me décrivent des recettes d’Afrique et nous discutons des vertus de la pâte d’arachide ou des feuilles de manioc introuvables en province. Une albanaise évoque en salivant les pâtes réalisées dans son pays qui n’ont d’équivalent nulle part. Kevin, que je connais déjà, imagine une tarte avec des vis en métal en guise de garniture. Seules les deux mamans écrivent leur recette du bonheur. Francine, toujours très à propos, en profite pour sortir le goûter. Nous n’aurons pas le temps de lire les productions des participants. J’en profite pour photographier les textes. Cela permet à chacun de garder le fruit de ce qu’il a écrit, mais c’est aussi une manière de leur présenter leur texte rédigé au traitement de texte et imprimé, comme le serait celui d’un livre. C'est valorisant.
Et comme le seront les textes de ceux qui figureront dans le festival de l’écrit (je m’aperçois que j’ai oublié de leur en parler).
Avec le thème des recettes, la première séance s’achève ainsi dans la joie et la faim…de revenir.
Et moi, je repars, comme d’habitude gonflé à bloc : à suivre…

 

Deuxième séance, le 17 avril 2025 :

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Comme convenu, j’ai recopié les textes des participants. Bien sûr, cela prend du temps, mais j’en gagne aussi un peu lorsqu’il s’agira d’en proposer certains pour le Festival de l’écrit. De plus, après cette première séance, cette action me permet de détecter les facilités ou les difficultés de chacun pour la chose écrite, mais également de m’apercevoir d’efforts passés inaperçus, comme Jonathan qui a doublé les acrostiches, ou Heïdi qui avait écrit deux textes sur le printemps en marge des consignes.
Malheureusement, les pensionnaires du Centre familial (Heïdi, Jonathan et Vanessa) ne sont pas venus, mais je retrouve avec plaisir ceux du Cada de Bar-le-Duc (Anxhela, Bienvenue, Sulleyman, Mifi), même s’il en manque deux, ainsi que ceux du foyer d’accueil (Sylvie, Éric, Joël et Sylvie), un nouveau Jeremy, arrivé avec son accompagnatrice Ornella. Car, il ne faut pas oublier les accompagnateurs qui font un travail formidable (Naïma, Lucie, et aussi Francine et Chantal, les tenancières de cette médiathèque dynamique qui nous accueille). J’ai grand plaisir à prononcer leurs prénoms et à les saluer. Nous sommes ainsi encore 15 autour de la table.
Le premier travail est ainsi de lire ou faire lire par les participants les textes de cette dernière séance, histoire de se mettre en voix et de ne pas rester statique.
Maintenant, nous pouvons avancer plus avant dans la production de petits textes destinés au Festival de l’écrit, que j’explique, et dont je cite quelques extraits de ceux, parmi eux, qui ont déjà gagné les années précédentes (Éric, Kevin et Sylvie). Kevin a ainsi écrit l’année passée un texte inspiré des « je me souviens » de Georges Perec et Sylvie une variation sur « Il y a ». Éric, lui, en 2023, se projetait avec un texte dans le futur.
Je propose ainsi d’écrire sur ces variations temporelles, passé (je me souviens), présent (Il y a) et futur. Mais au lieu d’utiliser ces inducteurs qui me sont familiers (Perec ou « Il y a »), je les laisse libre de démarrer, cela fait moins « procédé ». Et cela fonctionne à merveille pour cette séance. Ainsi, Kevin et Sylvie se sont particulièrement épanouis depuis 2 ans. Sylvie, qui était à peine capable d’écrire une seule phrase, aligne toute seule une page complète et très émouvante sur le futur mariage de son fils en juillet. Kevin imagine plus tard piloter une soucoupe volante. D’autres textes sont plus nostalgiques : ce sont ceux des demandeurs d’asile du Cada qui racontent les êtres aimés qu’ils ont dû abandonner dans leur pays, les péripéties de leur voyage ou la difficulté de se reconstruire. Et je découvre la personnalité incroyable de Joël qui nous gratifie d’un texte sur La misère de la philosophie de Proudhon, texte auquel répondit Karl Marx…
L’hétérogénéité des participants est étonnante, certains sont cassés par les accidents de la vie, d’autres tentent de s’intégrer et d’apprendre le français. Tous vivent dans un présent résigné ou incertain, mais débordent d’énergie. Un goûter clôt notre séance d’écriture et nous échangeons encore de belles histoires, comme celle de la fille albanaise d’une participante qui est liée d’une grande amitié avec une fillette afghane du même âge.
Bref, encore bien des instants chaleureux. Je repars dans le froid et la pluie à travers les bois, mais avec le sentiment d’une belle après-midi passée dans ce bout du monde.